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LA CHUTE
Printemps 2020
Entre deux souffles de confiture
J'ai eu le plaisir de participer à Remixer ma ville un projet collectif mené par Émilie Dushesne, photographe et belle humaine
Nous avons remixé des lieux inédits, des beautés oubliées, des étrangetés à l’histoire remarquable, des patrimoines officiels, officieux, ou simplement des lieux que nous aimons d’amour sur le territoire de notre mystique Shawinigan
Moi, j'ai choisi d'honorer la chute grandiose et sauvagesse qui scie Shawinigan en deux
Avec la collaboration de Franziska Reichherzer et Jeannot Bournival, je lui ai créé une chanson
Émilie en a fait un tableau magnifique
Pour vivre l’expo collective et interactive dans la vivance de la Shawinigan mystique, rendez-vous directement au parc des vétérans près de la rivière dans le bas de la ville de Shawinigan!
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DÉMARCHE
Parce que j’aime cette chute et que ça remonte à très loin, six générations au moins… mais je n’en connais que très peu sur cette vieille grand-mère Attikamek qui allait descendre la rivière vers le sud, enfanter une lignée de Pellerin, lignée qui allait finir par perdre un grand bout de ce qu’elle est sur le chemin du temps, perdre son nom, perdre sa trace… laissant un trou, une soif de revenir impossible à assouvir dans le courant de mes veines
Parce que j’aime cette chute et que cet amour dépasse mon entendement, je l’aime et j’en pleure, surtout quand elle crache sa rage, quand elle crie, quand elle jouit. Quand chaque printemps, dans une nudité originelle, une splendeur sacrée digne des plus beaux temples que la nature érige, elle existe en dehors des balises du barrage imposé et qu’elle redevient ce quelle a toujours été… sauvage
Parce que j’aime cette chute quand elle me rappelle à l’humilité, au craquement des acquis, au dépouillement que la mort connait par coeur et qu’elle enseigne à ma résistance pendant que je me refuse de naitre au mystère, alors qu’il marche à l’ombre de moi-même depuis le premier jour
Et même si les mots laissent aussi des trous, j’ai eu envie de lui fabriquer une poésie, intime et fragile, trouvée en terre introspective à la limite de l’impersonnel. Une poésie comme ce que je suis, inachevée… Une poésie qui relierait deux mondes, deux morceaux de terre, en soi. J’ai respiré dans l’écriture, comme en suspend au plein centre du pont de train qui vibre quand la rivière gronde… assise sur la ligne mince de l’interdit, à la jonction de quelque chose d’important, d’intangible, mais de bel et bien présent… Entre le vertige, la peur de mourir, l’envie de crier, de courir au néant et de sauter, la rivière m’a dit que je ne suis rien… et que même si Vivre me dépasse, il me faudra essayer. J’ai regardé mon reflet dans la chute, je me suis levée et j’ai marché vers l’autre
Franziska Reichherzer a battu le rythme soutenant la traversée. Dans sa machine, la musique s’est orchestrée, révélant l’invisible que seul le corps sait percevoir quand il ouvre ses pores de portes. Jeannot Bournival, en architecte des grands espaces, a éloigné les murs de la maison pour qu’elle devienne cathédrale, ouvert des fenêtres pour que le vent s’immisce, car le son, pour arriver jusqu’à toi, avait envie de danser de tout son long, envie d’élan… Et, entre deux silences qui se croyaient séparés, une chanson est née comme on s’incline pour remercier
Mais écrire une chanson n’était que ma façon de prendre part au lieu dans une expérience intime, un hommage personnel à la magnificence de cette chute. Elle fut ensuite un point de départ pour cocréer, un flambeau que je léguais à Émilie Dushesne pour qu’elle poursuive la louange dans son langage photographique. Ensemble, nous sommes parties remixer nos arts en arpentant les sentiers du parc des chutes. Émilie captait d’instinct et de justesse ce que la nature raconte dans sa langue d’absolu et nous refaisions le monde, entre les lignes du temps et du projet. Nous voulions superposer le personnage à ce qu’il voit de lui et de sa propre chute dans le miroir du lieu. Cette traduction visuelle est devenue une porte d’entrée, une invitation pour que tu puisses à ton tour, cher public, toucher cet état de réceptivité introspective dans ta rencontre avec la chute qui marque viscéralement le territoire dit Shawinigan comme un sanctuaire véritable au plein coeur d’une terre plus ancienne que son nom
credits
released August 1, 2020
Paroles: Liliane Pellerin
Musiques: Liliane Pellerin et Franziska Reichherzer
Arrangements: Franziska Reichherzer
Mixage et matriçage: Jeannot Bournival
Voix: Liliane Pellerin
Guitare: Liliane pellerin
Programmation électronique et synthétiseur: Franziska Reichherzer
Enregistrée au studio Pantouf et dans le Repère des pérégrines, juin 2020
Visuel: Émilie Duchesne
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